Que suis-je ? On peut leur accorder une attention esthétique toute particulière notamment lors des cours de Fitness. Les négliger au même titre que l’ensemble des groupes musculaires des membres inférieurs en musculation. Ou bien être adepte d’haltérophilie, de Fitness fonctionnel, de course à pied … et être persuadé(e) qu’il n’y a aucune raison de les solliciter plus spécifiquement pour être compétitif. Je suis un groupe musculaire…
Je parle bien entendu des muscles fessiers.
Pour reprendre l’idée générale et les mots d’un professeur de cardiologie parus dans un récent article du Figaro-Santé traitant du manque d’activité physique chez l’enfant : « Les gens ont tendance à penser que l’activité physique est bonne pour la santé. C’est un abus de langage. C’est l’absence d’activité qui est pathologique. Nous sommes faits pour bouger. »
Vous allez me dire quel est le rapport ?
Je pourrais vous répondre : connaissez-vous par exemple la pathologie appelée « l’amnésie du fessier » ?
Lisez, vous comprendrez qu’il est bien évidemment essentiel de pratiquer une activité physique ou sportive, mais on ne cesse de le répéter pas n’importe comment et en respectant certains principes. Un de ces principes bien plus important qu’on ne l’imagine, concerne l’attention que l’on doit porter à « son postérieur ». Et ce n’est pas qu’une question d’esthétisme, mais une nécessité pour optimiser ses performances, limiter le risque de blessures et préserver son intégrité physique et sa santé.
Pour bien comprendre un syndrome ou une pathologie musculaire et/ou articulaire, il est d’abord essentiel de bien analyser la structure et la physiologie d’action des systèmes musculo-articulaires auxquels on s’intéresse (Flack et al, 2012).
En l’occurrence ici le groupe musculaire des fessiers, muscles de la ceinture pelvienne (bassin : articulation sacro-iliaque en particulier) et de la hanche (articulation coxo-fémorale).
Le groupe musculaire des fessiers se compose de trois muscles monoarticulaires :
- le grand fessier (gluteus maximus ou grand glutéal)
- le moyen fessier (gluteus medius ou moyen glutéal)
- le petit fessier (gluteus minimus ou petit glutéal)
Figure 1 – Anatomie des muscles fessiers
Faisant partie des muscles de la hanche, le grand glutéal plus puissant muscle du corps humain en est son principal extenseur* (mouvement d’extension de la cuisse sur le bassin, vital pour l’homme dans la locomotion : pour marcher, courir, sprinter, sauter). Muscle dit phasique recouvrant le nerf sciatique, il est également :
En CCO (chaîne cinétique ouverte) :
- rotateur externe en plus d’être extenseur de la hanche
- adducteur de la hanche (faisceaux inférieurs)
- abducteur de la hanche (par ses faisceaux les plus élevés et sa partie superficielle qui prend part à la constitution du deltoïde fessier : voir ci-dessous)
En CCF (chaîne cinétique fermée) :
- en bipodal : rétroverseur du bassin, participe à l’action de la contraction des muscles du plancher pelvien
- en unipodal : entraîne un recul controlatéral de l’EIAS (épine iliaque antéro-supérieure)
*Dans notre analyse, notons qu’il existe un déséquilibre naturel entre le nombre de muscles (par fonction ou par composante) extenseurs de hanche (n=3 : grand fessier, ischio-jambiers, grand adducteur), et celui des fléchisseurs de hanche (n= 9 : iliopsoas, sartorius, droit fémoral, TFL, pectiné, long adducteur, gracile, petit et moyen fessier). Cependant, les fléchisseurs ne sont pas forcément des muscles très puissants surtout si on les compare au grand fessier…
Présent en deux plans (superficiel et profond), le grand glutéal appartient à la chaîne musculaire tricipito-quadricipito-fessière, chaîne d’extension du membre inférieur et chaîne d’impulsion. Il est ainsi particulièrement actif durant la course ainsi que dans tous les mouvements nécessitant de la force : se relever d’une position de flexion vers l’avant, sauter, marcher en terrain montant, etc. … Il le semble moins en station debout et n’intervient pas durant la marche normale. A noter qu’en excentrique, cette chaîne devient la chaîne de réception.
Le grand fessier joue par ses deux plans un rôle essentiel dans la stabilisation antéro-postérieure de la hanche.
Son plan superficiel (faisceaux) forme avec le tenseur du fascia-lata (TFL)** et le fascia-lata, le deltoïde fessier (de Farabeuf), qui, en plus d’être abducteur de hanche participe avec le moyen et le petit fessier à l’équilibre transversal du bassin lors de l’appui unipodal.
** Pour certains, le tenseur du fascia-lata fait partie des muscles glutéaux. Bien qu’il leur soit rattaché, il est plutôt considéré comme un muscle de la loge antérieure de la cuisse. Notons qu’il agit à la fois sur la stabilité du genou et du bassin, et qu’il possède une composante de flexion de hanche considérable, participant également à l’abduction et la rotation interne de l’articulation coxo-fémorale.
NB : on ne s’assied pas sur le muscle grand fessier, mais sur les tissus qui recouvrent la tubérosité ischiatique.
Vidéo : Anatomie 3D du grand glutéal
Ce sont deux muscles profonds de la hanche.
Le moyen glutéal est un muscle puissant et endurant, fonctionnant surtout en chaîne fermée sur un mode « stato-dynamique » (faibles variations de course concernant le membre en appui lors du passage du pas). Principal abducteur de hanche il est aussi :
En CCO :
- rotateur interne et fléchisseur de hanche; antéverseur du bassin (faisceaux antérieurs)
- rotateur externe et extenseur de hanche; rétroverseur du bassin (faisceaux postérieurs)
En CCF :
- ce muscle travaille essentiellement en course externe et moyenne pour assurer la stabilité du bassin (voir ci-après)
- en unipodal : élévation controlatérale de l’EIAS
Agissant comme hauban actif, il est le garant, avec le petit glutéal, de l’horizontalité et de la stabilisation latérale (transversale) du bassin lors de l’appui sur un pied. Ce qui lui confère un rôle extrêmement important pour la marche.
NB : sur un plan pathologique, sa défaillance peut se traduire par une claudication caractéristique : la boiterie de Tredelenburg.
Le petit glutéal, muscle fessier le plus profond, a les mêmes actions à minima que les fibres antérieures du moyen fessier qu’il assiste, comme nous l’avons vu, dans la stabilisation transversale du bassin. Il est essentiellement abducteur de hanche et par ses composantes :
En CCO :
- rotateur interne (dans sa quasi totalité)
- rotateur externe (faisceaux postérieurs)
- fléchisseur de hanche (faisceaux antérieurs)
En CCF :
- en bipodal : antéverseur du bassin (faisceaux antérieurs)
- en unipodal : avancée controlatérale de l’EIAS
NB : sa fonction semble néanmoins plus fléchissante que celle du moyen fessier.
Vidéo : Anatomie 3D du moyen et du petit glutéal
Le groupe musculaire des fessiers qui participe donc à l’ensemble des mouvements de l’articulation coxo-fémorale ainsi qu’à son équilibre, joue également (avec les ligaments de la hanche) un rôle primordial dans la stabilité du bassin.
Dès lors, l’organisation articulaire de tout le complexe lombo-pelvi-fémoral peut être remise en question, si on néglige trop fréquemment l’entraînement des muscles glutéaux, notamment le grand fessier, « gardien » de l’extension de hanche (cf. note sur le déséquilibre naturel). De fait, une faiblesse musculaire peut causer une déficience du contrôle moteur, répercutant les contraintes osseuses (ou vertébrales au niveau de la colonne) sur les tissus passifs. Ce dépassement de fonction est extrêmement préjudiciable pour ces structures physiologiques, l’atteinte des tissus entraînant une cascade de réactions pouvant causer des blessures et une incapacité à réaliser certaines activités ou certains mouvements.
L’altération des fonctions glutéales engendrée par l’absence de sollicitations spécifiques et régulières des muscles fessiers, va en plus orienter le processus neuromusculaire vers une stratégie de « mise à l’écart » de ces muscles du schéma moteur et particulièrement du grand fessier : c’est « l’amnésie du fessier » (nom donné par Dr. Stuart McGill, professeur canadien spécialisé dans la biomécanique de la colonne vertébrale).
Un processus (sur lequel nous reviendrons) accentué par la station assise prolongée, comme il le souligne. En effet, elle est par convenance la position de travail et de confort la plus utilisée en société. Seulement, la position assise est physiologiquement bien plus néfaste qu’il n’y paraît comme nous allons le voir.
Pourquoi avons-nous les fessiers apparents ?
Chez le bipède humain que nous sommes, la hanche est placée en extension expliquant de ce fait le peu d’extensibilité des muscles ischio-jambiers, plus tendineux et membraneux (élément important à retenir). De ce fait, cela favorise l’hypertrophie compensatrice de la masse fessière.
Rappelons que le bassin, partie du squelette particulièrement massive et stable (par sa nature et sa fonction), est le carrefour traversé par la majorité des chaînes musculaires où se confrontent les pressions du poids du corps et les contre-pressions provenant du sol. Jouant de ce fait un important rôle de support et de transmission.
Elle est également la zone où se situe le centre de gravité du corps humain, lui conférant par l’intermédiaire de la hanche (lieu où le fémur se rattache au tronc : articulation coxo-fémorale), une fonction directionnelle fondamentale par rapport à l’ensemble squelettique et plus globalement à l’appareil locomoteur (motricité).
En effet, lors du passage chez l’homme de la station quadrupède à la position bipède, la hanche qui était l’articulation proximale du membre postérieur, est devenue l’articulation de la racine du membre inférieur, assumant de ce fait un rôle d’orientation et d’appui.
En s’intéressant de plus près aux surfaces articulaires qui la constituent (tête fémorale et sa cavité : l’acétabulum), on constate :
- qu’en station quadrupède, la tête fémorale est complètement rentrée dans l’acétabulum (coïncidence des surfaces articulaires = coaptation)
- qu’en station debout, la tête fémorale est partiellement rentrée dans l’acétabulum (non-coïncidence des surfaces articulaires = coaptation partielle)
- qu’en station assise, la tête fémorale n’est plus en contact avec l’acétabulum (absence de coïncidence des surfaces articulaires = décoaptation)
Effectivement, la coaptation ligamentaire des surfaces articulaires est :
- optimale quand la hanche est en extension, les ligaments de l’articulation étant en tension
- partielle en station érigée, les ligaments étant distendus (distension ligamentaire)
- faible quand la hanche est en flexion (comme en position assise), moment où les ligaments sont relâchés (relâchement ligamentaire)
NB : paramètre en faveur de l’évolution de l’homme, il semblerait que la quadrupédie soit la position physiologique de la hanche.
En conséquence, la station assise est la position dans laquelle la hanche, du fait du relâchement ligamentaire, est en situation d’instabilité. Cette instabilité étant maximale lorsque les jambes sont croisées (flexion, adduction et rotation interne de la hanche). De plus, elle induit une augmentation des pressions contre les structures vertébrales et osseuses et porte atteinte à la mécanique de chaque disque intervertébral lombaire (Wilder et al., 1988). Et de ce fait réduit la mécanique des muscles extenseurs (McGill). Si par manque ou absence totale d’activité musculaire efficiente, on y ajoute l’altération de la composante coaptrice des muscles fessiers (surtout petit et moyen fessiers désignés comme étant les « muscles appendeurs » de la hanche), on comprend mieux les risques pathologiques engendrés. Et la survenue de troubles pouvant être à l’origine de blessures comme l’amnésie du/des fessiers.
Outre les facteurs modifiables qui influencent les blessures sans contact (mauvais patterns de mouvements, facteurs environnementaux, force, faiblesse, fatigue, déséquilibres musculaires … respiration !) sur lesquels nous pouvons agir dans une approche prophylactique (nous y reviendrons), attachons-nous après l’étude des structures anatomiques, à mieux cerner un autre des facteurs non modifiables : le processus neuromusculaire.
D’après McGill, les blessures, en particulier au niveau de la colonne vertébrale, « semblent être plus influencées par l’aptitude du système de commande motrice d’un individu que par des facteurs tels que la force. »
L’amnésie du fessier, syndrome complexe encore assez méconnu – on pourrait l’imager comme étant une perte de « mémoire » de ces muscles (« amnésie ») – touche aussi bien les sédentaires et les personnes se trouvant régulièrement en position assise au travail comme au repos, que les sportifs présentant une défaillance (fatigue, raideur, déséquilibre …) des glutéaux.
Dans la vie courante comme lors d’une activité sportive, tout mouvement fait appel à la synergie d’un ensemble de muscles selon un schéma moteur (ou pattern de mouvement). Il n’est jamais le seul fait d’un muscle isolé.
En cas d’affaiblissement ou de défaillance d’un ou de plusieurs muscles, il faut savoir que le corps cherchera toujours par tous les moyens des stratégies musculaires pour produire le mouvement (compensations), quitte à en modifier le schéma moteur. Pouvant entraîner à terme une détérioration de la commande motrice, facteur qui serait prépondérant aux blessures comme nous l’indique McGill. Ces stratégies musculaires se traduisent par le recrutement de nouvelles unités motrices et par la mise en jeu de tous les muscles synergiques au(x) muscle(s) défaillant(s) : processus appelé dominance des synergistes.
Ayant pour conséquence des réactions en chaîne :
- défaillance d’un muscle : ses synergistes prennent le relais,
- la sur-activation et la sur-sollicitation de ces muscles synergistes provoquent une augmentation de leur raideur,
- et entraîne une désactivation de leurs antagonistes, qui doivent eux-mêmes être remplacés par l’activité de leurs synergistes,
- qui à leur tour vont se retrouver à être sur-sollicités, enraidis … etc.
Cette « amnésie » qui touche principalement le grand fessier peut se traduire de la manière suivante :
Le grand fessier ne remplissant finalement plus son rôle, les fixateurs du fémur (pyramidal, petit fessier) peuvent également se raidir, entraînant une compression du nerf sciatique avec tous les risques que cela engendre …
Par conséquent, voici les atteintes possibles :
- risque de lésions au niveau des ischio-jambiers (contracture, déchirure)
- affections de la hanche et du bassin (douleurs, arthrose)
- lésions au niveau de l’articulation du genou (tendinites, syndrome de la bandelette ilio-tibiale, syndrome rotulien, blessures au LCA)
- atteintes lombaires (hernie discale, lombalgie, sciatique, cruralgie)
A terme raideurs, déséquilibres et compensations de toutes sortes vont conduire à des adaptations posturales voire des troubles fonctionnels.
Effectivement, une fatigue ou un dysfonctionnement musculaire au niveau du bassin (articulation proximale) affecte davantage le contrôle postural unipodal qu’un malfonctionnement musculaire de l’articulation de la cheville (articulation distale) (Gribble et Hertel, 2004); un déconditionnement musculaire de la hanche pouvant favoriser une perte musculaire des membres inférieurs (Berg et al., 2007). Les facteurs favorisants les blessures se trouvent ainsi considérablement augmentés et l’altération de la performance globale avec.
Avant toute chose, j’attire votre attention sur le fait que cette proposition de test est une piste de réflexion qui peut apporter certaines indications quant à la déficience du grand fessier. Elle ne doit en aucun cas être considérée comme une approche à visée thérapeutique.
De par la complexité du syndrome, la littérature est assez pauvre à ce sujet.
Aussi pour évaluer le grand fessier et déterminer le profil à risque de chacun(e), référons-nous aux techniques de testing musculaire de Daniels et Worthingham utilisées en thérapie manuelle par les kinésithérapeutes.
Réalisation : premièrement, placez-vous au sol en position ventrale jambes tendues écartées de la largeur de votre bassin. Décollez lentement la cuisse dans l’amplitude disponible en maintenant votre bassin plaqué au sol (figures 2 et 3).
Répétez lentement l’opération cinq fois et voyez si vous ressentez d’abord :
1. une contraction du grand fessier
2. une contraction de l’ischio-jambier
Figure 2 – Testing du grand glutéal (étape 1)
Figure 3 – Testing du grand fessier (étape 2 : extension de hanche)
(source : chaîne YouTube de Patrick Meinart)
Si vous êtes dans le cas 1, vous semblez être dans la bonne stratégie musculaire de l’extension de la hanche : recrutement du grand fessier en premier, puis de l’ischio-jambier.
Si vous êtes dans le cas 2, prenez garde : vous pouvez présenter les prédispositions d’un fessier « amnésique ».
Si vous êtes dans l’incapacité de décoller votre cuisse, attention ! La faiblesse des extenseurs de hanche semble importante et vous êtes peut-être sujet(te) à un flexum de hanche (limitation permanente de l’extension). Dans ce cas, avant toute autre démarche, un avis médical et thérapeutique est conseillé.
Dans une approche prophylactique en vue d’une performance globale durable, ou plus simplement pour se maintenir en forme et minimiser tout risque de blessures lié notamment à cette amnésie du fessier, il est important de reconsidérer la place centrale que doit occuper l’activation comme le renforcement régulier des muscles glutéaux (Fisher et al., 2016) et de tous les muscles pelvi-trochantériens dans vos entraînements.
Une étape primordiale dans la conception des mouvements dit « préparatoires » (« movement prep » en anglais). Comme le souligne Benjamin Del Moral dans son livre, reprenant les propos de Mark Verstegen (fondateur et président de EXOS), les mouvements préparatoires sont « une approche résolue, systématique et efficace destinée à préparer l’individu aux besoins spécifiques de l’entraînement ou de la compétition. […] Ils diminuent le risque de blessures tout en améliorant la performance des athlètes de manière globale. »
Une phase qui, de par ses effets sur le recrutement des unités motrices, sur la coordination inter et intra-musculaire et sur les structures tendineuses et articulaires, doit être placée au début de votre séance (surtout si c’est un entraînement d’haltérophilie, de musculation des membres inférieurs, de Fitness fonctionnel, de course …) ou de votre compétition. Afin de potentialiser toutes les capacités en vue d’une performance à court, moyen et long terme : « demain se prépare aujourd’hui. » Comme Gottschall et al. (2013) l’ont par exemple montré : pour eux, l’intégration conjointe de différentes sollicitations des muscles fessiers et des deltoïdes antérieurs (muscles distaux du tronc) durant cette phase préparatoire améliorerait l’activation des muscles abdominaux et lombaires et « serait optimale en termes de maximisation de la force, d’amélioration de l’endurance, de renforcement de la stabilité, de réduction des blessures, et de maintien de la mobilité. »
Afin d’être le plus objectif possible, et dans la continuité de notre analyse, nous allons nous appuyer sur la littérature scientifique pour proposer de manière cohérente, une classification des meilleurs exercices pour les fessiers.
Deux récentes études de Contreras et al. (2015), considéreraient le Barbell Hip Thrust (BHT : figure 4) comme l’exercice par excellence pour activer le grand fessier comparé au Back Squat (BS), et aux exercices placés sur le dos proposant une extension de hanche avec des bandes élastiques. Cela semble encore discutable d’autant que les auteurs soulignent l’évidence d’une activation accrue du grand fessier mesurée par EMG lors de l’exécution de dix répétitions au BHT (essentiellement par des filles) par rapport aux autres mouvements. Mais précisent l’existence d’une incertitude quant à sa corrélation avec une amélioration de la résistance, de l’hypertrophie et de la performance du grand glutéal. Un approfondissement avec une population élargie et mixte semble nécessaire.
Figure 4 – Le Barbell Hip Thrust (BHT)
D’autant que le BHT qui, du fait de sa réalisation et du positionnement de la barre sur le bassin s’adresse à un public averti ayant déjà de solides bases en terme de posture et de gainage. Raison pour laquelle nous préférons privilégier des exercices plus accessibles à un large public.
Pour aboutir à notre classification des meilleurs exercices de fessiers répertoriés en fonction de leur efficacité de recrutement (% MVIC : Maximum Voluntary Isometric Contraction) pour le grand, le moyen et le petit glutéal (tableau ci-dessous), et leur intérêt dans l’activation et le renforcement des muscles de la ceinture abdominale et pelvi-trochantériens, nous nous basons sur les études de Boren et al. (2011), de Macadam et al. (2015) et les déductions de Gottschall et al. (2013) (voir partie précédente). En plus de tout ce qui a été dit jusque-là.
Même si ces exercices sont sans doute parmi les plus efficaces, ce classement reste bien entendu exhaustif devant la multitude d’exercices existants (ou à imaginer) pouvant être réalisés (fentes, soulevé de terre, extension de la hanche à la machine …).
Des exercices qu’il est conseillé d’inclure :
- systématiquement dans vos échauffements avant un entraînement ou une compétition (phase d’activation). Ils seront réalisés avec une charge/résistance progressive (faible à modérée) au moyen d’un mini-élastique, d’haltères … sans oublier l’intérêt des auto-massages avec foam roller dans le processus d’activation musculaire (Cheatham et al., 2015)
- régulièrement dans vos programmes d’entraînements dans une logique d’entretien et/ou de développement musculaire. Le type d’exercice et la charge étant adaptés à votre profil, vos objectifs et aux exigences liées à votre discipline sportive.
Pour ma touche personnelle concernant le grand fessier, je rajouterai un exercice que je vois rarement exécuté de la sorte : gainage dorsal réalisé sur swiss-ball avec les pieds sur un Bosu® (figures 5 et 6).
Les deux points d’instabilité (swiss ball et Bosu®) que préconisent Gottschall et al., permettent un recrutement particulièrement efficace des muscles lombaires, du grand fessier et des quadriceps. Une variante consiste à placer un ballon ou un medecine ball entre les jambes pour accentuer les sollicitations au niveau des adducteurs et des muscles pelvi-trochantériens.
Si vous n’avez jamais testé, essayez, vous m’en direz des nouvelles …
Figure 5 – Gainage dorsal réalisé sur swiss-ball avec les pieds sur un Bosu® (glute bridge on swiss ball and feet on Bosu®)
Figure 6 – Variante avec medecine ball
NB : gardez à l’esprit que cette démarche d’activation et de renforcement des muscles glutéaux a pour but de les replacer au sein d’une synergie musculaire ((ré)intégration au schéma moteur) et ne doit surtout pas être confondue avec un travail d’isolation.
L’amnésie du fessier est de toute évidence un syndrome assez représentatif de notre société actuelle : les contraintes et les conventions de la position assise notamment, nous obligent à être particulièrement attentifs à nos habitudes de vie ou d’entraînement que nous soyons sédentaire, actif ou sportif. Cela démontre encore une fois l’importance de pratiquer une activité physique régulière, et nous parlions de convenance, d’en connaître les « bonnes manières » (et d’être bien conseillé(e) !). Effectivement la récurrence de ce phénomène pas toujours clairement identifié il faut l’avouer, démontre le manque de considération voire l’ignorance que peuvent avoir certains pratiquants comme certains éducateurs sportifs vis-à-vis de ces principes « préparatoires » et prophylactiques (et leur réalisation !), dont l’activation systématique et le renforcement régulier des muscles fessiers font partie comme nous venons de le voir. Au même titre que toutes les routines d’entraînement qui concernent les muscles de la ceinture abdominale et lombaire, les muscles profonds (transverse, muscles de la coiffe des rotateurs) … etc.
Bien entendu, vous trouverez toujours des études (ou des avis) qui mettront en doute ces principes : le rôle des muscles glutéaux dans la prévention des blessures par exemple (Harrison et al., 2015), pendant que d’autres viendront confirmer leur rôle essentiel dans la préparation à la performance (Comyns et al., 2015). Pour celles et ceux qui me lisent, j’ai récemment repris dans mon article sur les étirements : « les vérités d’hier ne sont souvent pas celles d’aujourd’hui et encore moins celles de demain. » Et si pour une fois ce n’était pas de vérités dont nous parlions, mais de certitudes. A vous d’en juger …
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Le Figaro-Santé : édition du 6 avril 2016
Anatomie 3D Lyon : Grand fessier, tenseur du fascia-lata, deltoïde fessier (muscles de la hanche)
Anatomie 3D Lyon : Les muscles de la hanche : petit fessier, moyen fessier
Patrick Meinart (chaîne YouTube) : BodybuildingRev
Sciences du sport : Force des muscles de la hanche et blessure au niveau du ligament croisé antérieur
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